Pire que d’être quitté.e : rester ensemble pour de mauvaises raisons

En 2012, j’ai écrit « Je me suis fait larguer ». C’était à l’origine un programme quotidien que l’on recevait par mail, et c’est ensuite devenu un livre édité par Eyrolles. Lors de la promotion de ce livre, j’ai produit beaucoup de contenu pour positionner ce site sur les thématiques de la rupture amoureuse. Il reste quelques exemplaires du bouquin à la vente, mais je ne vends plus le programme. 
Le contenu ci-dessous date de cette époque et génère encore un peu de trafic sur ce site.

Illusion de l'amour

cet article est librement traduit de celui-ci

L’illusion de l’amour est infiniment plus douloureux que l’abandon

La peur de l’abandon

Interrogez les gens sur « leur plus grande peur dans leurs relations » et la plupart d’entre eux répondront « être quitté ».
Dans cet échantillon aléatoire (et plus ou moins représentatif ) de personnes à qui l’on demandait ce qu’ils redoutaient le plus en amour :


« S’engager dans une relation avec quelqu’un et réaliser plus tard que ça n’est pas ce qu’il/elle souhaitait »

« De le/la faire fuir parce que je suis émotionnellement insécure et légèrement instable »

« Qu’un jour, tout change. Ses réponses, lorsqu’elles arriveront, seront dures. Sans prévenir, tout s’effondrera et je ne saurais pas ce qu’il s’est passé. »

« D’aimer de tout mon coeur et que ça ne marche pas »

« Qu’il me quitte parce que je suis trop difficile à comprendre/gérer. Qu’il fasse ça gentiment, ce qui rendrait les choses encore plus horribles »

« Une de mes professeurs de collège en plein divorce avait dit : ‘c’est comme si on déposait son argent sur un compte en banque et qu’un jour, lorsque tu en as le plus besoin, tu veux faire un retrait et tu réalises que le compte est vide’ La première fois que j’ai entendu cette histoire, ça m’a glacé le sang »

Je comprends cette peur

Vraiment.

Je comprends qu’on puisse avoir ce déchirement, cette sensation de malaise et d’anxiété; de ne jamais savoir de manière certaine si vous êtes à deux doigts de perdre la personne que vous aimez le plus. Ou si vous êtes déjà en train de tout foutre en l’air sans même le savoir. De ne pas savoir si vous le/la faites fuir parce que vous en faites trop, ou si au contraire vous n’en faites pas assez.

A chaque pas que vous faites vers lui.elle, il.elle se raidit un peu plus, ce qui vous déroute de plus en plus.

Je comprends.

Mais être quittée n’est pas ma plus grande peur

Parce que :

  1. Je respecte mes partenaires en tant qu’individu, et je respecterais leur décision de vivre leur vie comme ils ont besoin de la vivre, même si ça doit être sans moi. Ca ne veut pas dire que ça ne me blesserait pas, le contraire est probable. Mais mon respect pour eux comme individus est plus grand que mes propres émotions.
  2. Je respecte les changements de l’univers, et ce que l’univers donne, l’univers peut le reprendre.
  3. Etre quittée n’est pas la pire des choses.

Je dis ça brutalement, mais honnêtement : ma plus grande peur n’est pas l’abandon. J’ai peur de l’illusion de l’amour.

Parce que lorsqu’on est quittée, au moins, on est libérée.

On est libérée. Votre partenaire vous relâche dans l’univers, en vous redonnant une chance pour le bonheur.

Et c’est gentil de sa part.

Mais s’il s’accroche à vous, en vous gardant près de lui, en vous guidant dans sa vie, en s’investissant juste ce qu’il faut pour vous garder sous le coude – sans jamais vraiment tenir à vous ni vous aimer d’une manière saine – ça, c’est vraiment, vraiment pire que d’être quitté.e.

La peur des artifices

Je suis terrifiée à l’idée de l’illusion de l’amour. L’amour égoïste. L’amour superficiel. L’amour à court-terme. L’amour co-dépendant. L’amour qui n’est en fait qu’une habitude. L’amour qui ne parle que de ses besoins, ou de votre capacité performatrice de couple, le « c’est comme ça qu’on doit faire ». L’amour trou-noir, l’amour qui vous vide.

Parce que, voyez-vous, bien pire qu’un partenaire qui vous dit « je ne t’aime plus », il y a ce partenaire qui vous regarde dans les yeux et qui vous dit qu’il vous aime « parce que tu es belle ».

Ou lorsqu’il vous dit « je t’aime » en pensant à quel point vous êtes parfaite dans sa vie, à quel point vous répondez à ses besoins. A quel point vous avez coché toutes les cases dans sa checklist.

C’est parler d’ « amour » alors qu’en réalité, on parle d’obligation, de propriété, de droit, de mieux savoir que l’autre. C’est de ne même plus prendre la peine d’avancer masquer lorsque vos choix de vie contrarient ses opinions.

C’est de faire de l’ « amour » un champ de bataille de manipulation et de guerre émotionnelle.

C’est de le voir si bien s’en sortir que la situation dure des années.

C’est de le voir considérer que l’amour, c’est d’abord et avant tout l’amour de soi.

Et le pire, c’est que l’illusion de l’amour peut être une illusion parfaite.
C’est l’amour que l’on voit dans les films. Dans les chansons. Dans quasiment tous les livres que l’on lit. On le voit autour de nous, dans la vraie vie de nos parents, de nos amis. L’illusion de l’amour est partout.

En réalité, la peur de l’amour-illusion et la peur de l’abandon, c’est presque pareil.

Tous les deux s’articulent sur l’investissement  — injecter de l’énergie et des émotions dedans, parfois pendant des années  — uniquement pour le voir se dissiper, partir en fumée devant nos yeux.

Que votre partenaire vous quitte ou vous regarde dans les yeux en disant « je t’aime parce que tu es belle/beau », dans les deux cas vous n’avez plus que la sensation qui dit « oh mon dieu… »

Mais l’amour-illusion est plus douloureux —parce que votre partenaire y croit dur comme fer.

Et il veut que vous y croyiez aussi.

Ca n’est pas net comme une rupture. Dans la plupart des cas, il n’essaye même pas de vous quitter. Il pense réellement vous aimer. Il transpire l’illusion mais il le fait avec un sourire si sincère, sans aucune conscience de ce qu’il vous demande.

Ce dont j’ai le plus peur, c’est de voir l’illusion de l’amour se déployer alors qu’il me regarde avec cette expression déchirante et me dit de la manière la plus sérieuse du monde : « c’est ça l’amour, tu n’auras pas mieux que ça ! »
c’est à dire « c’est ce que tu peux attendre de mieux, c’est ce que tu mérites »

Alors que non. Pas du tout.

Et c’est ça qui est difficile.
Parce que :
1 – c’est la sensation la plus horrible du monde que de prendre conscience que l’on nage depuis longtemps dans une relation toxique,
et dans une moindre mesure
2 – parce que c’est à vous de le/la quitter. Et qu’il/elle ne comprendra même pas pourquoi.

L’illusion est pire que l’abandon

Parce qu’au moins, l’abandon est une libération. Et —  en plus —  c’est honnête.
Honnête l’un avec l’autre, honnête avec soi-même.

cet article est librement traduit de celui-ci

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